J’avais déjà lu ce roman de Jacqueline Harpman, je savais que j’en avais gardé un bon souvenir mais quid de l’histoire? J’avais beau interroger ma fulgurante mémoire, rien ne me revenait sinon, une petite touche d’immortalité…
Vous qui vous êtes régalés en découvrant les pièces de Marivaux, il se pourrait que vous vous amusiez tout autant en lisant ce roman. Il y a des amours contrariés, des chassés-croisés, du fantastique et une belle galerie de personnages. Le tout est présenté sous une forme épistolaire moderne puisqu’il s’agit d’un échange de mails entre les différents protagonistes. Mais nous sommes loin d’Emmi et Léo, de Quand souffle le vent du nord. Ici le langage est châtié, pimenté, très relevé et plein d’un humour très subtil.
Je suis étonné. La plupart des femmes, sauf vous, chère Clarisse, traînent en général des bagages trop lourds pour elles, il faut les aider, les armoires ne suffisent pas car elles possèdent plus de vêtements qu’on n’en peut user dans une vie. Où étaient la trousse de maquillage, le sèche-cheveux et les bigoudis, la robe du soir, la robe de nuit, la robe de chambre et la robe d’intérieur, le tricot en cours, ce vaste paraphernalia qui doit être organisé au prix d’une longue réflexion?
Mais l’histoire? demandez-vous en trépignant. Oui, l’histoire… Elle se déroule dans un institut d’astro-physique à Bruxelles. Là, travaillent Clarisse et Johann, entre autres. Comme ils sont en manque de personnel, Johann propose à une jeune femme, Adèle, rencontrée à Saint-Petersbourg, de rejoindre leur équipe. Or, il se trouve qu’Adèle est… immortelle. Née au seizième siècle, elle a traversé toutes les époques sans vieillir et ne connait qu’un homme qui ait la même particularité qu’elle, Jean-Baptiste. Consciente du danger que cette particularité peut lui faire courir, elle ne peut jamais rester trop longtemps au même endroit et doit toujours être prête à fuir… Et elle ne peut aimer d’autre homme que Jean-Baptiste.
Je me suis toujours demandé pourquoi, hors l’amour qui fait tout endurer, une femme se donne la fatigue de mettre un homme dans son lit. Cela tient éveillée quand on a sommeil et s’endort quand on voudrait causer.
Clarisse et Johann ont été formés par deux chercheurs : Delphine et Werner, qui sont désormais à la retraite, s’aiment mais vivent le plus souvent loin de l’autre. Lorsque le roman débute, Delphine raconte à son fidèle ami qu’elle vient d’apercevoir dans la rue une femme qu’elle a connue quarante ans auparavant et que cette dernière n’a pas pris une ride. Est-ce possible? Ce mystère ne cesse de troubler son repos…
Le passage des Ephémères constitue un agréable divertissement mais pas seulement. Parce qu’il cache une profonde réflexion sur la vie, ce que les simples mortels peuvent en faire ou non, il peut être lu comme une fable sur la fragilité de l’humanité.
L’homme est si fou, on peut tout craindre et tout espérer.
L’avis d’Anne.
Le passage des Ephémèrs, Jacqueline Harpman, Grasset, 2003
tu me tentes avec ce billet et ces extraits, merci je ne connaissais pas ! j’adore le deuxième extrait !
@ Lucie : moi aussi, j’aime beaucoup la formulation du deuxième extrait. Je l’ai lu à mon mari mais curieusement, il n’a pas trouvé ça drôle… 😉
Tiens, ce serait une excellente occasion de découvrir l’auteur .. le thème est original, je me demande comment elle s’en est sortie ?
@ Aifelle : motus et bouche cousue, je ne dirai rien… 😉
Ah mais les phrases de l’atelier de dimanche étaient donc extraites de ce livre tout à fait charmant si j’en juge par les citations proposées ! Le titre me plaît beaucoup, je le note !
@ Asphodèle : oui, les phrases venaient de ce roman, en effet… J’espère que cela t’aura donné double raison de le lire! 🙂
J’aime cette auteure, les extraits me plaisent, je le lirai !
@ Olivia : c’est tellement bien écrit, un vrai régal!
Je ne l’ai jamais lu, ce Harpamn-là… Ben je le note aussi, tiens !
@ Anne : et moi, c’est le seul que j’ai lu. J’ai bien envie d’en découvrir d’autres…
Le premier que j’ai lu, c’était « Le bonheur dans le crime », j’avais adoré, mais il faut dire que je me représentais très bien « la Petite ceinture », la portion de périph de Bruxelles où se déroulait le roman. « La plage d’Ostende », très bien aussi.
Je n’ai encore rien lu de cette auteur. Ce serait peut-être l’occasion avec ce titre-ci car les histoires de ces couples m’intriguent.
@ Mango : la 4ème de couverture fait référence aux Liaisons dangereuses, pour moi, on est plutôt dans le marivaudage…
Anne aime beaucoup cette romancière effectivement et c’est elle qui me la fait connaitre, en m’offrant un de ses livres : « moi qui n’ai pas connu les hommes ». Si tu as l’occasion de le lire, c’est très bien. Très fort. Quant à moi, je croiserai certainement de nouveau cette plume…
@ Sylire : oui, elle écrit joliment et avec beaucoup d’esprit… j’aime ce style!
je suis contente de voir tout cet enthousiasme pour Jacqueline Harpman!
@ Adrienne : enthousiasme amplement mérité!
Je ne connais pas et je le note dans ma LAL!!!!!
@ Clara : enfin une auteure que tu ne connais pas! 😉
Ben, quelle vision sombre et négative. Pas rassurant … A bientôt !
@ David : non, ce n’est pas sombre, ni négatif, simplement lucide je crois… De l’homme on peut attendre le meilleur comme le pire.